Un quart de siècle a passé depuis que les premiers cas de sida ont été identifiés. En vingt-cinq ans, cette maladie a fondamentalement changé la face du monde en tuant plus de 25 millions de personnes et en bouleversant complètement le développement de certains pays. En 2006, on estime que près de quarante millions de personnes vivent avec le VIH (virus de l’immunodéficience humaine)… Ce qui était à l’origine considéré comme un “cancer gay” s’est révélé, dès 1983, transmissible également par voie hétérosexuelle, mais aussi par voie sanguine (drogues injectables, transfusion…), et de la mère à l’enfant pendant la grossesse et à la naissance. En 1988, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) choisit la date du 1er décembre comme Journée mondiale de lutte contre le sida. L’Assemblée générale des Nations Unies exprime sa vive préoccupation devant cette pandémie en décidant immédiatement d’instaurer dans la durée cette journée du 1er décembre. Lors de l’édition 1995, l’ONU décide de créer un programme spécifique destiné à coordonner l’action des différentes agences spécialisées dans la lutte contre le sida : ONUSIDA. Chaque année, cet organisme publie un rapport comportant notamment la situation de tous les pays du monde, sous la forme d’estimations clés et d’échantillons d’indicateurs décrivant la situation de la pandémie du VIH, ainsi que des ripostes locales mises en place. Depuis 1988, qui fait office d’année de référence, le nombre moyen de nouvelles infections au VIH diagnostiquées en Belgique est de +/- 3 par jour. En 2005, l’estimation du nombre de personnes vivant dans notre pays avec le VIH est de 19.000 (Source : Institut de Santé Publique Louis Pasteur). On pourrait croire que les nombreuses campagnes de prévention orchestrées dans notre pays ont eu l’impact nécessaire pour réduire d’année en année le nombre de cas diagnostiqués, mais il n’en est rien, et c’est même tout le contraire qui se passe : contre toute attente, l’année “record” du nombre de nouvelles infections est 2005, avec 1066 nouveaux diagnostics. Si l’on compare avec 2004, on compte 6,6% de cas en plus. C’est d’autant plus préoccupant si l’on sait que l’année du précédent record était… 2003. Qu’on l’admette ou pas, le sida nous concerne tous, sans distinction d’âge, de sexe, de statut social, d’origine ethnique ou d’orientation sexuelle. Même s’il se soigne mieux, il ne se guérit toujours pas, et le préservatif reste le seul moyen de protection efficace lors des relations sexuelles : il reste en effet une technique vitale de prévention. Malheureusement, de nombreux hommes, hétérosexuels comme homo- ou bisexuels entretiennent des attitudes négatives face à la capote, estimant notamment que son utilisation limiterait le plaisir et/ou entraverait l’intimité sexuelle entre partenaires réguliers. Cependant, une promotion soutenue et déterminée du préservatif peut concourir à dépasser ces types de résistances. La distribution massive (et gratuite) de préservatifs a ainsi permis, dans certains pays, de réduire de façon significative l’incidence de la pandémie. Contrairement aux craintes souvent exprimées ou aux stéréotypes courants, des recherches poussées n’ont pas trouvé de corrélation entre une éducation sexuelle incluant la promotion du préservatif et une augmentation de l’activité sexuelle. Le préservatif masculin est donc devenu l’objet de ce que l’on peut appeler le “marketing social” : la prévention doit être rendue visible. C’est dans cet esprit que certaines manifestations ont vu le jour ces dernières années, sous la forme de pose de préservatifs géants. Ainsi, le 1er décembre 1993, une capote de 30 mètres est déroulée sur l’obélisque de la Place de la Concorde à Paris à l’initiative de l’association Act Up qui, à la même occasion rebaptise symboliquement la place “Place des morts du Sida”. Douze ans plus tard, le secrétaire à la Santé du Gouvernement argentin prend une initiative similaire sur l’obélisque de Buenos Aires par la nécessité de “ne pas baisser la garde” devant la menace du sida qui touche plus de 120.000 personnes en Argentine. Cette année, Alliàge a décidé, en collaboration avec l’asbl “D’une certaine gaieté”, Sid’Action – Pays de Liège et le Centre de Référence Sida – CHU de Liège, de monter un projet semblable sur le symbole des libertés des liégeois : le Perron.
Michel Thomé
(Sources : ONUSIDA)