Édito | Février 2016

Après les affaires Jarfi et Kotnik, une nouvelle tentative d’assassinat homophobe à Liège ?

Les 12 et 17 décembre dernier, le journal La Meuse relatait le calvaire enduré par Guy, séquestré, violé, frappé, puis jeté dans l’Ourthe. Les faits se sont déroulés au mois de janvier 2015. Les deux agresseurs présumés ont été identifiés et interpelés par les forces de l’ordre en octobre et décembre 2015. Le parquet a retenu la tentative d’assassinat avec circonstance aggravante d’homophobie pour les deux inculpés.

Les faits :

Janvier 2015 : Guy va boire un verre dans le quartier du Longdoz. Il y rencontre deux hommes qui lui paraissent sympathiques et auxquels ils parlent de son homosexualité. Convaincu qu’il est en bonne compagnie, il monte dans leur voiture pour raccompagner une quatrième personne qui avait trop bu. Après avoir déposé cette dernière, les deux hommes l’emmènent au bord de l’Ourthe, à Angleur. C’est là que le calvaire de Guy commence. Il échappera de justesse à la noyade dans une Ourthe glacée après avoir subi ratonnades et sévices sexuels.

Février 2015 : Guy dépose plainte rapidement. La brigade judiciaire commence son enquête et retient d’emblée le motif homophobe de l’agression et, parallèlement, conseille à Guy de prendre contact avec la Maison Arc-en-Ciel de Liège – Alliàge, ce qu’il fait le 3 février 2015. C’est un homme en état de choc qui sera reçu par l’un des employés de la MAC-Alliàge. Après lui avoir proposé un moment d’écoute puis de prendre contact avec l’une de nos personnes ressources psychologues, nous signalons l’agression au Centre pour l’Egalité des Chances.

De février à octobre 2015 : Guy se constitue partie civile et prend un avocat. L’enquête suit son cours et le premier agresseur présumé est interpellé.

Décembre 2015 : seconde interpellation en France, à Carcassonne. Les deux prévenus sont inculpés de tentative d’assassinat avec circonstance aggravante d’homophobie sur une personne psychologiquement fragile. C’est le soulagement pour Guy et deux articles paraissent dans le journal La Meuse (à notre connaissance). Au moment d’écrire ces lignes, la date du procès n’est pas encore connue.

Il se fait que certains d’entre nous, et probablement certains d’entre vous, connaissent Guy. Malgré une certaine fragilité psychologique et sociale, il a joué un rôle important dans le milieu associatif LGBT liégeois il y a de nombreuses années.

Comme dans l’affaire Kotnik, c’est à une personne fragile que les deux prévenus se sont attaqués. Comme dans l’affaire Jarfi, les agresseurs dominaient en nombre et ont utilisé un véhicule pour emmener leur victime dans un endroit isolé.

Pourtant, à ce jour, les médias ont peu relayé l’info.
Jacques Kotnik et Ihsane Jarfi ont été victimes d’agressions homophobes qui leur ont coûté la vie. Guy a eu la chance (mais peut-on parler de chance) d’en réchapper.

Suite à cette nouvelle agression, la Maison Arc-en-Ciel de Liège – Alliàge :

– salue le travail de la brigade des mœurs et du parquet ainsi que la prise en compte par celui-ci de la motivation homophobe de l’agression ;

– demande à la Secrétaire d’Etat en charge de l’Egalité des Chances, Madame Elke Sleurs, de relancer rapidement le travail sur le plan interfédéral de lutte contre l’homophobie et la transphobie initié par le précédent Gouvernement ;

– attire l’attention des autorités de la Ville de Liège sur la mise en œuvre de la circulaire COL 13/20131du Collège des procureurs relative a` la politique de recherche et de poursuite en matière de discriminations et de délits de haine ;

– demande au Gouvernement fédéral d’inclure la lutte contre les discriminations et délits de haine dans la Note Cadre de Sécurité intégrale2 ainsi que dans les priorités du futur Plan National de Sécurité.

Le Conseil d’administration de la Maison Arc-en-Ciel de Liège – Alliàge

1. La COL13/2013 est une circulaire du collège des procureurs relative au traitement des plaintes pour discrimination ou délit de haine. Cette circulaire prévoit notamment une communication en bonne intelligence entre le parquet et le Centre Interfédéral pour l’Égalité des Chances, la présence de magistrats de référence dans chaque arrondissement judiciaire et des agents de référence au sein de la police fédérale et communale.

2. La Note cadre de sécurité intégrale (NCSI) et le Plan national de sécurité (PNS), en discussion pour le moment au fédéral (et avec les entités fédérées), auront pour but de lister les priorités de la politique criminelle pour les prochaines années. Pour l’instant, les négociations se sont principalement focalisées sur le terrorisme.