Édito | Mars 2019

Si mon intention lorsque j’ai commencé à écrire ces quelques lignes était de vous parler de Bilal Hassani, d’intersectionnalité et de la situation compliquée dans laquelle se trouvaient certaines personnes, l’actualité m’a rattrapé, et je me vois obligé d’aborder un tout autre sujet dans cet éditorial.

On a parfois tendance, en Belgique, à se dire que tout va bien. On se dit que l’homophobie au sens large est en recul et que nos droits sont de plus en plus respectés. En tant que militant, on se félicite souvent du chemin parcouru. Et puis, certains événements, nous ramènent durement à la réalité. Cette semaine, un individu d’une trentaine d’année a vandalisé la Maison Arc-en-Ciel de Charleroi après s’en être pris de manière très agressive à l’employé de cette maison. Cette semaine encore, dans son interview donnée au groupe Sudpresse et publiée ce lundi 25 février 2019, Monseigneur Léonard, ancien évêque de Namur et archevêque de Bruxelles, s’exprime dans le cadre du sommet sur les actes pédophiles dans l’Eglise qui se tenait le week-end dernier, à Rome. Il y déclare, entre autres, qu’il faut « que l’on soit prudent dans le recrutement des prêtres. Il faut réfléchir à la question de l’homosexualité […]. Lorsque l’on ordonne des prêtres, il faut donc être très attentif à ce qu’ils aient vécu une sexualité cohérente. Si l’orientation homosexuelle a été longue et reste profondément ancrée chez le candidat prêtre, il ne faut peut-être pas l’ordonner ».

La Maison Arc-en-Ciel de Liège se joint à Arc-en-Ciel Wallonie, la coupole régionale wallonne des associations LGBTI et des Maisons Arc-en-Ciel pour condamner fermement ces propos faisant un amalgame entre pédophilie et homosexualité. Bien que ce lien nauséabond et dangereux ne soit pas nouveau dans les discours religieux, nous dénonçons avec force les propos tenus par Monseigneur Léonard. En tant qu’acteur-trice-s de terrain, nous voyons les effets des phobies à l’égard des personnes LGBTI au quotidien. Nous nous battons pour lutter contre les stéréotypes et préjugés, parfois profondément ancrés dans la société. Faire ce lien équivaut à ramener la pédophilie à un comportement accessoire à l’homosexualité. Faire ce lien favorise un discours de haine à l’égard des personnes LGBTI. L’homosexualité ne peut, en aucun cas, être associée à la pédophilie ou à d’autres types de comportements similaires.

Les phobies à l’encontre des LGBTI sont en recul certes dans notre pays, cependant, les cas d’agressions sont toujours bien présents. Les homophobes de tout poils sont moins nombreux qu’autrefois cependant, il sont toujours présents. Si je ne rejoins pas ceux qui clament haut et fort que rien n’a changé, que le monde est toujours aussi hostile à notre encontre, je pense que le combat est loin d’être gagné. Il nous incombe de rester vigilants. C’est là l’une des raisons d’être de votre Maison et l’actualité nous rappelle une fois encore que nous avons un rôle à jouer.

Cyrille Prestianni et Tom Devroye