Édito | Mars 2009

Les dernières attitudes et prises de position de Benoît XVI et du Vatican ont causé, à raison, pas mal de remous. Ne parlons pas des paroles outrageantes et insultantes proférées par Monseigneur Williamson. Comment est-il tolérable, en effet, que soit niée publiquement l’existence des chambres à gaz ? L’impression est nette : le Vatican rétrograde et un catholicisme musclé est en train de s’imposer. Je ne citerai que quelques exemples.

Le décorum et le cérémonial aujourd’hui en vigueur à Rome traduisent cette tendance de manière très visible. Depuis quatre ans, les pressions du Vatican sur les responsables politiques en matière d’éthique ou de droit familial sont de plus en plus marquées. En nommant le très aligné Monseigneur Alas nouvel archevêque au Salvador, Benoît XVI poursuit le grand combat de sa vie de cardinal en tentant de purger l’église de la théologie de la Libération, un courant progressiste très répandu en Amérique latine. Quant au dialogue entre les religions initié principalement par Jean XXIII et Jean-Paul II, il est à l’arrêt depuis quelques années.

La communauté homosexuelle, elle, a été particulièrement secouée au lendemain du 22 décembre dernier. En effet, Benoît XVI a profité de son traditionnel discours de fin d’année pour rappeler qu’il n’était pas du recours des hommes de se choisir une orientation ou un genre sexuels et qu’il n’y avait que Dieu pour dicter l’état des choses relevant de la loi naturelle. Il a, de plus, répété clairement sa volonté de “protéger l’homme contre la destruction de lui-même”, en n’hésitant pas à mettre sur le même pied l’homosexualité et le réchauffement climatique. De tels propos, c’est relativement rassurant, ont heurté une grande partie de l’opinion internationale tant, même s’ils sont très certainement quelque peu à nuancer, ils sont difficilement acceptables.

La position du Vatican quant à l’homosexualité n’a guère évolué. Nous ne pouvons qu’être inquiets de cette rigidité d’esprit. Pour rappel, dès 2005, année de sa prise de fonction, l’ancien cardinal Ratzinger diffusait une circulaire défendant l’accès à la prêtrise aux séminaristes homosexuels. Comme s’il y avait une certaine obsession à propos de l’homosexualité…

Une semaine avant ce bien peu glorieux discours, devant l’assemblée générale des Nations unies, 66 pays ont lancé un appel pour la dépénalisation universelle de l’homosexualité considérée comme un crime dans 77 états… et passible de la peine de mort dans 7 états (Arabie Saoudite, Emirats arabes, Iran, Mauritanie, Nigéria, Soudan et Yémen). Une soixantaine de pays, en majorité issus de la péninsule arabique et de l’Afrique, ont condamné cet appel. La chine, la Russie et les Etats-Unis n’ont pas signé le texte ; pas plus, d’ailleurs, que le Vatican qui craint que, avec ce texte, l’ONU n’aille plus loin : mariage gay, adoption ou procréation médicalement assistée…

Ainsi, nous ne pouvons que nous interroger sur la portée des paroles de Benoît XVI et des prises de position du Vatican. N’est-ce pas, d’une certaine manière, tendre la main aux homophobes qui vont pouvoir ainsi justifier leur haine ? Comment un gay croyant et pratiquant va-t-il pouvoir s’intégrer sereinement au sein de l’Église ou, tout simplement, vivre sa foi ? Qu’en est-il des homosexuels qui ne s’acceptent pas, qui ont encore peur de parler, qui vivent loin des grandes villes ou, même, qui évoluent dans des milieux clairement homophobes ? Nous sommes aisément en mesure d’imaginer la détresse et le sentiment d’insécurité de tous ceux-là. Je ne peux toutefois terminer sans rappeler que les paroles du pape ainsi que certaines prises de position du Vatican ne reflètent pas, fort heureusement d’ailleurs, le point de vue de très nombreux chrétiens.

Jean-François, président